En juin 2020, le réseau de soins psychiatrique Epsylon a ouvert la MSP « Les 3 Arbres »[1]. Une MSP ou maison de soins psychiatrique est un lieu de soin résidentiel. Son objectif est d’accompagner les personnes stabilisées qui ne nécessitent plus un suivi à l’hôpital et qui souhaitent encore un encadrement psycho-social leur permettant de développer ou d’acquérir une autonomie fonctionnelle, afin de mettre en place leurs projets de vie futures.
En février 2021, ils ont engagé Pierre Waterlot, pair-aidant à temps-plein (le 1er en Belgique Francophone). Il a suivi la formation pair-aidance UMons 2020 et, dans le cadre de cette formation, a fait 2 stages dont 1 pour « Les 3 Arbres ». Ensuite, il a poursuivi en tant que bénévoles. Une expérience concluante qui a abouti à son engagement.
Le profil du pair-aidant
Comme pour les autres travailleur.se.s, ses tâches sont caractérisées par une approche transversale : donner des traitements, régler des problème administratifs et sociaux, participer à des formations, assurer l’accueil téléphonique… et cette polyvalence contribue à son intégration dans l’équipe.
Le pair-aidant est référent de deux résidents pour lesquels il est l’interlocuteur privilégié, il assure leur suivi administratif, le suivi du traitement, le contact avec les psychiatres, les proches… Comme le reste de l’équipe, il participe à des intervisions cliniques. Sa pratique évolue sans cesse. C’est nouveau : pour lui et pour l’équipe. Les postures qu’il adopte peuvent parfois poser questions et c’est donc débattu en équipe, pour éviter les tensions.
La MSP est un nouveau projet, en construction, cela implique une liberté de proposition, de prises d’initiatives initiatives… C’est un contexte favorable pour lancer des activités, des projets nouveaux… Pierre propose un atelier musique, un autre autour de la menuiserie et assure la gestion de la boulangerie artisanale (responsable de la production quotidienne de pains et pâtisseries).
Avec un collègue infirmier et un psychiatre, il organise un groupe de parole autour du rétablissement, de l’échange de savoir et d’expériences et aussi un peu de psycho-éducation. Autour de ces thématiques, le groupe de paroles permet de créer du lien et d’aider les patient.e.s en questionnement.
Il est aussi impliqué dans les entretiens de familles, ce qui lui permet de partager son expérience, de déstygmatiser les situations et de redonner espoir aux patient.e.s et aux proches.
La particularité de son approche est de pouvoir prendre le temps avec les résident.e.s. Il se considère comme un trait d’union alternatif entre l’équipe et le public. A titre personnel, Pierre estime que c’est un tournant dans son parcours de rétablissement. Il estime que jusqu’à présent sa professionnalisation n’impacte pas la particularité de sa relation avec les patients, le cadre singulier des « 3 Arbres » lui offre le confort pour pouvoir cultiver cette particularité.
L’avis de la coordinatrice
Céline Debruyne est infirmière de formation. Depuis un an et demi, elle est responsable d’équipe de ce nouveau projet de MSP du réseau Epsylon. Elle s’intéresse à la pair-aidance depuis longtemps, y a notamment consacré un mémoire : elle s’est intéressée à ce qui faisait obstacle à l’intégration de la pair-aidance du côté des soignants. Au fil des témoignages apparait le constat que, même si les équipes étaient bien préparées, il y avait toujours ce facteur chance/imprévu, de l’ordre de la rencontre, qui fait que ça va marcher ou pas. Elle a donc décider de prendre le contrepieds de cette approche qui consiste à préparer, sensibiliser les équipes, essayer de les « convaincre ». C’est la condition même de ce projet : avoir au moins 2 au pair-aidant.e.s au sein de l’équipe. Ce qui a aidé, c’est qu’il partait de zéro : il n’y a pas eu à convaincre l’équipe ou un CA, ça faisait partie intégrante du projet et de son adn.
La MSP propose une temporalité de soin qui facilite peut-être l’intégration de pair-aidant.e. Ils sont résident.e.s et non patient.e.s, c’est un lieu de vie et pas seulement un lieu de soin. Contrairement aux hôpitaux, le séjour implique plus de temps pour faire connaissance et accompagner dans la prise en charge et la construction de leur projet. Ils ont pris la décision de tutoyer les patient.e.s, de développer une dimension familiale, c’est aussi différents de ce qui se passe en hôpital. La proximité, le temps, permettent que le pair-aidant puisse s’intégrer. Il n’y a pas d’urgence et pas de hiérarchie des fonction : l’équipe est polyvalente, partage en partie les mêmes missions et les mêmes horaires.
A chaque obstacle, le dialogue avec le pair-aidant permet de le dépasser. Échanger en amont permet aussi d’éviter les difficultés potentielles. Par ailleurs, il suit les intervisions proposées par le PAT.
[1] https://www.epsylon.be/index.php/msp