Le Junkiebond est un groupe d’auto-support d’usagers de drogues couvrant la décennie 1980. Le premier Junkiebond est formé en 1980 à Rotterdam. Le Rotterdam Junkiebond est constitué en réponse concrète à un projet d’instauration d’un système de soins obligatoire pour les toxicomanes. Sa formation fut l’étincelle qui déclencha la formation des organisations similaires dans presque toutes les villes hollandaises. Les six années entre 1981 et 1987 ont vu naître et mourir une quarantaine de ces Junkiebonds dont la durée de vie oscillait entre un et trois ans.
C’est pourquoi, dans certaines villes plusieurs groupes se succédèrent. Avec la formation de la Fédération des Junkiebonds, organe de coordination et de représentation, les usagers des drogues ont su donner une dimension nationale à leur mouvement. Le mouvement atteint son apogée lorsque le Parlement adopte une motion présentée par le Parti socialiste pacifiste, qui stipule que le gouvernement hollandais doit se concerter, en matière de politique de la drogue, avec la Fédération des Junkiebond. Les bases de ce que sera le modèle hollandais reposeront désormais, sur l’action conjointe des pouvoirs publics et d’un partenaire d’un genre nouveau : le toxicomane.
Les six années 1981-1987, sont à la fois les années de gloire du mouvement et en même temps celles qui annoncent son déclin : en effet, comme acteur politique l’auto-organisation des junkies ne survivra en tout et pour tout que dix ans. De multiples facteurs peuvent expliquer sa disparition. Le principal est que le mouvement des Junkiebonds eut comme raison d’être les conditions déplorables des toxicomanes dans leurs pays : carence du système de soins, répression, stigmatisation sociale…
Le partenariat entre les pouvoirs publics et les junkiebonds, en l’espace de quelques années, a ainsi permis d’instaurer une sorte de modus vivendi acceptable par tout le monde, usagers des drogues compris. Ce modus vivendi s’est concrétisé par des mesures de réduction des risques, notamment par la généralisation des programmes de substitution à “bas seuil” et du système de prise en charge sanitaire et sociale, déjà le plus développé d’Europe. Un partenariat avec la police, situant cette dernière davantage comme une pièce maîtresse du dispositif global de santé publique que comme une force de répression, fut mis en place. Objectivement, toutes les revendications du mouvement furent donc satisfaites. De surcroît, elles sont devenues la politique officielle du pays en matière de drogue. Les Junkiebonds par leur propre action ont, pour ainsi dire réduit à néant leur raison d’être.
Sources : TOUFIK Abdalla, JAUFFRET Marie, Les groupes d’auto-support d’usagers de drogues.